Publié en avril 2016 aux éditions Actes Sud
Varian est un garçon singulier, doté d’une intelligence rare et d’une mémoire sans faille. Malgré l’amour de sa famille, il s’isole dès sa petite enfance. Hypersensible, surdoué et peu viril, il est vite en danger au lycée et devient un jeune homme compulsif, impuissant, obsédé.
Quand son père, depuis toujours marin pêcheur, doit quitter le foyer pour aller chercher du travail dans l’Ouest, quand sa mère demeurée sans nouvelles perd tout sens du réel, Varian, lui, est aux prises depuis longtemps déjà avec les voix qui parasitent et colonisent son cerveau.
Et c’est dans cet état, tout à la fois vulnérable et violent, qu’il part à la recherche de son père. Diplômé, il est facilement embauché sur le site de Terrebrute, au coeur même d’une région déchiquetée par de gigantesques opérations d’extraction pétrolière.
Là, Varian fait la connaissance de deux activistes écologistes…
Je ne crois pas vous avoir déjà parlé de mon amour pour Nancy Huston ici, pourtant c’est l’unes des auteures que j’apprécie le plus. Bouleversée par Lignes de failles, émue par Prodige, marquée par L’empreinte de l’ange, c’est avec un certain enthousiasme que je me suis plongée dans son nouveau roman, Le club des miracles relatifs. Nancy Huston nous emmène dans une famille unie par le miracle d’une naissance tardive. Dès son plus jeune âge, Varian se révèle être sensible, trop pour exercer le métier de son père, pêcheur. Refusant de faire du mal à toute créature consciente, il devient végétarien et refuse de participer aux activités de son père, ce qui l’éloigne petit à petit de celui-ci. Sa mère, quant à elle, ne cesse d’être éblouie par les talents de son fils, son protégé, son idole, tout en délaissant doucement son mari. La situation délicate prend fin quand la pêche est soudain interdite sur l’île, obligeant la famille à se séparer
Le temps passe et le père de Varian ne revient toujours pas, il décide donc de partir à sa recherche dans un pays où tout le monde semble étranger et où l’humanité vacille. Déjà fragile, Varian est vite détruit par ce monde qui ne lui correspond pas. L’écriture de Nancy Huston retrace ses pensées et paroles dans quelques chapitres savamment mis en page, où les espaces occupent autant de place que les mots et où les phrases se mélangent, se perdent et ne se finissent pas toujours clairement. Varian perd pied, et pour cause, il est torturé car soupçonné d’être écologiste, la pire espèce dans le monde de Terrebrute. Son hypersensibilité n’a pas sa place dans une entreprise occupée à détruire tout ce qui s’approche d’elle et le malaise du personnage fait écho à l’état de cette nature ravagée.
Le club des miracles relatifs relate d’autres histoires, d’autres personnages perdus en ce monde qui court à sa perte, exploitant les ressources et maltraitant les êtres. La narration est totalement déstructurée, passant d’une époque à une autre, nous emportant encore davantage dans cet univers où rien ne tient vraiment debout et qui, bien qu’il serait tentant de le présenter comme une dystopie, pourrait aussi bien être notre monde. Ce roman est pour moi un ovni, mais un ovni qui ose : perdre le lecteur, ne pas lui accorder ses habitudes, ses refuges et le bousculer. Ose aussi se baser sur des faits réels pour en afficher la monstruosité, puisque Nancy Huston évoque sa région d’origine, Alberta (Canada) où l’extraction de sable bitumineux entraîne une catastrophe écologique et éthique.
» La région est aussi l’une des plus polluées du pays (par capital), avec un taux de cancer élevé, des pluies acides et une pollution des eaux souterraines et superficielles. L’extraction du pétrole est également coûteuse en énergie et nécessite de grands volumes d’eau. L’activité économique fait reculer la forêt et affecte la faune de cette partie de l’Alberta. Le boom pétrolier de l’Alberta a attiré des milliers de personnes en quête d’embauche immédiate et de salaire élevé. Mais, été comme hiver, les conditions de travail sont dures. Chaque soir, les ouvriers doivent dîner et dormir sur place, dans des préfabriqués qu’ils ne quittent qu’en fin de semaine. »
(Wikipédia, page Alberta)
Je ressors avec un sentiment étrange de ce roman, une certaine tristesse pour Varian bien qu’on puisse deviner qu’il n’a pas la conscience tranquille. J’ai été un peu gênée par le manque d’une fin concrète, sans savoir ce que ça peut réellement signifier. Une lecture inhabituelle, parfois douloureuse sans en devenir désagréable, que je recommanderais à ceux qui ont envie de sortir des pistes balisées pour explorer un roman qui ne s’offre pas trop facilement au lecteur tout en abordant des thèmes essentiels dans le monde actuel.
Waw il a l’air vraiment intéressant ! Comme tu le dis dans ton article : un ovni (quand j’ai lu le résumé c’est le mot qui m’est venu). Mais la lecture doit être complexe comparé à ce que j’ai l’habitude de lire. Je le note quand même quelque part pour plus tard. Merci pour ton article je ne connaissais pas cette auteur 🙂
Oui il est particulier mais ça fait du bien de lire un roman qui sort un peu du lot au niveau de sa narration et de sa mise en page ! Il est assez abordable tout de même, il faut juste bien se mettre dans la lecture ^^. Si tu veux découvrir l’auteure avec une lecture plus « facile » je te conseille « Lignes de faille » qui est vraiment génial.
J’ai lu deux romans de cette auteure, Ligne de faille (que j’avais beaucoup aimé ) et Danse noire (moins aimé soyons honnête) , c’est vrai qu’elle a une écriture assez particulière et qu’il faut y adhérer, sinon c’est compliqué!
Je n’ai pas lu Danse noire, peut-être que je m’abstiendrai pour le moment alors. J’ai déjà quelques romans et essais que j’aimerais rattraper avec cette auteure :). Ses histoires me touchent souvent, mais je comprends que tout le monde ne ressente pas forcément la même chose.
ça me donne envie, surtout que j’avais bien aimé d’autres titres de cette auteur (lus il y a longtemps).
Si tu aimes bien Nancy Huston et les thèmes qu’elle évoque souvent, ça devrait pouvoir te plaire !