Publié en 1933, disponible aux éditions 10/18
À la fin des années 20, Orwell tombe brusquement dans la misère. À Paris puis à Londres, il découvre le quotidien des petits ouvriers et des laissés-pour-compte, tenaillés par la faim et rongés par l’alcool. Sans voyeurisme ni complaisance, il dresse un portrait vivant de ces habitués du mont-de-piété où l’espoir et l’infortune se livrent un duel épique. (résumé éditeur)
« Un mendiant, à voir les choses sans passion, n’est qu’un homme d’affaires qui gagne sa vie comme tous les autres hommes d’affaires, en saisissant les occasions qui se présentent. Il n’a pas plus que la majorité de nos contemporains failli à son honneur : il a simplement commis l’erreur de choisir une profession dans laquelle il est impossible de faire fortune.»
Je ne peux pas dire que ce livre a été un coup de cœur, c’est trop difficile pour moi de juger ainsi une œuvre qui décrit de telles choses et qui étale la misère telle qu’elle est, sans y ajouter de poésie.
La descente débute à Paris, où, sans le sou, Orwell réussit difficilement à se faire embaucher en tant que plongeur dans un hôtel de luxe. La différence entre les pièces que les clients connaissent et les sombres cuisines où les employés se bousculent du matin au soir est percutante. Les cuisiniers, garçons, plongeurs évoluent dans des pièces trop petites, étouffantes et sales. C’est une époque où les salariés ne connaissent pas encore les avantages dont nous pouvons bénéficier aujourd’hui dans les pays développés. Ils travaillent ainsi du lever au coucher du soleil, six, parfois sept jours par semaine pour une paie de misère qui subvient à peine à leurs besoins vitaux. Le seul bénéfice obtenu est dépensé le samedi soir dans les bars parisiens, ou auprès de prostituées.
Orwell croit enfin à des jours meilleurs lorsqu’un ami londonien lui propose de retourner en Angleterre où il a déjà trouvé un emploi pour lui. Malheureusement, l’employeur est absent pour encore quelques semaines lorsqu’Orwell débarque de l’autre côté de la Manche. Il découvre donc les lodgings houses, et, quand il n’a même plus les moyens de s’offrir ces piètres dortoirs, les asiles où les vagabonds passent la nuit enfermés pour tenter de dormir dans un confort inexistant.
Ce parcours est parsemé de rencontres plus ou moins surprenantes au sein d’un univers à part du reste de la société. Ceux qu’on regarde de travers parce qu’ils n’ont ni les moyens de bien se nourrir, se laver et encore moins celui de s’instruire. Malgré cela, Orwell continue de réfléchir et nous livre des réflexions édifiantes sur ce milieu, il consacre même un chapitre à l’argot londonien de l’époque qui est juste passionnant. J’ai été tentée de citer une bonne partie du livre dans cet article mais je vous laisserai le découvrir vous-même. Je vous joins juste une citation retrouvée sur Babelio qui m’avait frappée lors de ma lecture :
« Si vous parlez à un riche n’ayant pas abdiqué toute probité intellectuelle de l’amélioration du sort de la classe ouvrière, vous obtiendrez le plus souvent une réponse du type suivant : « Nous savons bien qu’il n’est pas agréable d’être pauvre ; en fait, il s’agit d’un état si éloigné du nôtre qu’il nous arrive d’éprouver une sorte de délicieux pincement au cœur à l’idée de tout ce que la pauvreté peut avoir de pénible. Mais ne comptez pas sur nous pour faire quoi que ce soit à cet égard. Nous vous plaignons – vous, les classes inférieures – exactement comme nous plaignons un chat victime de la gale, mais nous lutterons de toutes nos forces contre toute amélioration de votre condition. Il nous paraît que vous êtes très bien où vous êtes. L’état des choses présent nous convient et nous n’avons nullement l’intention de vous accorder la liberté, cette liberté ne se traduirait-elle que par une heure de loisir de plus par jour. Ainsi donc, chers frères, puisqu’il faut que vous suiez pour payer nos voyages en Italie, suez bien et fichez nous la paix. » »
On pourrait dire que ce livre a été écrit il y a longtemps, que les choses ont beaucoup évolué depuis, et en un sens, c’est plutôt vrai, du moins dans les deux pays où Orwell a vécu. Pourtant, il reste encore des vagabonds, et il reste aussi des employés qui n’ont pas le temps de réfléchir à autre chose qu’au métro boulot dodo. Ce témoignage trouve donc curieusement le moyen de faire écho à notre propre époque, et c’est loin d’être flatteur. Après en avoir appris davantage sur le parcours cet auteur, je suis encore plus impressionnée et fascinée par son oeuvre.
Je ne connaissais, mais ce roman pourrait me plaire ! L’ambiance a l’air d’être très particulière, voire même un peu »dérangeante ». Je trouve toujours dur de devoir lire le malheur des gens, surtout quand ils ont vraiment existé… Mais c’est la plupart du temps très enrichissant ! Merci de la découverte 🙂
Oui ce n’est pas vraiment un genre facile à aborder et c’est assez difficile de prendre du recul… Je n’ai pas trouvé l’ambiance trop « dérangeante », moins que celle de ses 2 œuvres principales en tout cas. Orwell entrecoupe le récit avec des chapitres de réflexion donc ça aide un peu à alléger la chose sans trahir le témoignage. J’espère que tu trouveras un moment pour le lire :).
je ne connaissais pas ce roman, il m’a l’air intéressant d’un point de vue sociétal.
Il l’est, même s’il a été écrit il y a déjà longtemps, certaines réalités ne s’effacent toujours pas.